Horloge Wagner - photo Lazar Kunstmann pour Untergunther
Horloge Wagner - photo Lazar Kunstmann pour Untergunther

En 2005, un groupe d'exploration urbaine nommé La Mexicaine de Perforation, du collectif UX, se laisse enfermer dans le bâtiment, ils en subtilisent les clés et en font un double. A ce groupe  succède, six mois plus tard, un autre groupe nommé Untergunther du même collectif qui mène à bien des chantiers de rénovation du patrimoine invisible ou négligé et qui a mené une douzaine de chantiers à Paris. Ce groupe remarque l'horloge en panne, analyse l'urgence de la nécessité de rénovation, sans laquelle l'horloge est vouée à la destruction corrosive et se met en devoir de la rénover, il nomme son chantier UGWK.

L'un des membres de ce groupe est Jean-Baptiste Viot, un professionnel de l'horlogerie, anciennement employé par la maison Bréguet. La restauration commence en septembre 2005. Le groupe aménage un atelier clandestin dans la galerie circulaire à la base de la coupole, l'équipe de mobilier escamotable et d'une installation électrique rénovée ! Pendant une année complète, quasi quotidiennement, les activités vont avoir lieu : documentation du mécanisme ("autopsie de l'horloge") destinée à comprendre les conséquences des sabotages précédemment évoqués. La roue d'échappement étant irréparable, une nouvelle roue est fabriquée avec du laiton conforme à l'ancien. Chaque pièce est également passée dans un "bain d'horloger", frottée, grattée et lustrée jusqu'à retrouver un état nominal. Quelques poulies et câbles furent changés et la partie électrique mise de côté.

L'horloge enfin possiblement fonctionnelle, quatre restaurateurs clandestins prirent rendez-vous avec l'administrateur Bernard Jeannot pour lui annoncer la restauration et la possibilité de faire refonctionner l'horloge. Ce dernier accueillit la nouvelle avec enthousiasme.mais dans les semaines suivantes il partit à la retraite et fut remplacé par son adjoint Pascal Monnet. Ce dernier n'avait pas apprécié que des intrus pénètrent dans son bâtiment pendant un an et il poussa le Centre des Monuments Nationaux (CMN) à porter plainte contre les quatre clandestins. L’avocat du CNM réclame 48300 euros de dommages et intérêts aux UnterGunther. Toutefois à l'issue du procès aucune charge ne fut retenue contre les membres d'Untergunther, mais l'horloge resta arrêtée. Un soir de Noël à l'occasion d'une fête clandestine organisée par La Mexicaine de Perforation, Jean-Baptiste Viot relança l'horloge. Le lendemain en l'entendant sonner, Pascal Monnet, furieux, décida d'engager un artisan de la maison Lepaute pour à nouveau saboter l'horloge en en retirant la roue d'échappement. D'autres membres du collectif UX subtilisèrent alors ladite roue afin de la mettre en lieu sûr.

En 2018 arrive l'épilogue de cette étrange histoire. Gaétan Bruel, le successeur de Pascal Monnet a lancé un chantier de rénovation complète de l'horloge (et non plus seulement de son mécanisme). Le lot mécanique fut gagné par Jean-Baptiste Viot, cette fois-ci à titre professionnel et la roue retrouva sa place. Désormais l'horloge est remontée toutes les semaines et si d'aventure vous allez au Panthéon, vous pourrez l'entendre sonner.

Anecdote tirée du livre de Jérôme Denis & David Pontille, Le soin des choses. Politiques de la maintenance. Plus d'infos