Tout d'abord comme le souligne dans un autre contexte le professeur de philosophie Thomas Schauder, "deux conceptions de la valeur s’opposent : d’un côté, la valeur d’un bien ou d’un service dépend de son prix, c’est-à-dire de la possibilité de l’échanger contre un autre bien ou service (c’est la « valeur d’échange ») ; de l’autre, la valeur dépend de l’utilité, voire de la nécessité, de ce bien ou service (c’est la « valeur d’usage »). Les deux sont bien distinctes car l’or ou le diamant ont une très forte valeur d’échange (ça coûte très cher), mais une très faible valeur d’usage. A l’inverse, le ticket de bus a une très faible valeur d’échange et une très grande valeur d’usage." Un renseignement généalogique a donc une valeur d'usage importante pour certains (généralement les descendants) mais pas pour d'autres, la vente d'un renseignement perdu dans une masse d'autres renseignements (une base de données par ex.) est donc globalement une dilution de la valeur d'usage... L'approche de valeur est donc complètement différente entre un généalogiste professionnel (qui vous vend sa compétence et le temps passé à faire des recherches à votre place) et une entreprise de généalogie qui vous vend un accès à une ou des bases de données les plus grosses possibles (qu'elles soient documentaires, archivistiques ou ADN)

"La valeur d’échange est relative à la loi du marché, alors que la valeur d’usage, bien que variant selon les individus, peut apparaître comme beaucoup plus stable : si demain le prix du diamant augmentait, ça n’empêcherait pas grand monde de dormir, alors que lorsque le prix de la nourriture augmente, cela peut entraîner des famines." Soustraire une chose ou un service de la loi du marché donc à en fixer ou en plafonner le prix, ou encore en assurer la gratuité est donc un acte politique (dans le sens de ce qui a trait au collectif). Nous pensons que cette gratuité est au service de tous et que les renseignements donnés ne devraient pas constituer un élément de la "loi du marché".

"Qu’est-ce qui vaut le plus ? Est-ce ce qui est utile individuellement ou socialement, ou est-ce ce qui est cher ? La publicité et le marketing consistent souvent à nous faire croire qu’un objet, un service est utile, voire indispensable, tout en restant très cher et les valeurs financières viennent concurrencer les valeurs morales. La valeur des cadeaux à Noël dernier que nous avons offerts ou reçus dépendait-elle de leur prix ? La valeur des repas en famille ou entre amis dépendait-elle du fait d’avoir mangé du foie gras ou des huîtres ? Les vœux que nous nous échangeons en début d'année comme La santé, le bonheur, l’amitié, l’amour, la réussite dans leurs projets, ne sont pas réductibles à des données de marché et sont de plus gratuites..." Quand nous échangeons entre généalogistes de bon vœux de recherche, ne sommes nous pas également en train de parler de choses gratuites comme nos autres vœux ?

Pour aller plus loin on peut également renverser la phrase de Milton Friedman et dire comme Nietzsche « Tout ce qui a un prix n’a pas de valeur ». C'est à dire qu'à partir du moment où l'on fixe un prix dénué de la relation à l'effort, au labeur, à l'investissement, au travail réel, on en casse la relation avec la valeur. Dans nos sociétés contemporaines, on tente de nous inciter à obtenir des objets ou services moyennant un prix élevé sans garantie de valeur réelle. Quand on parle de valeur, on parle d’idéalité et non de matérialité. Un prix n’est pas une valeur en soi ce n’est que la matérialité d’un échange. Pour Kant cette idéalité représente la dignité humaine. A bon entendeur...