Aujourd'hui j'aimerais vous parler de droit de glanage et de droit de passage à l'occasion de la parution des deux articles en référence.

Commençons par le glanage. Le glanage fut longtemps un véritable droit qui revêtait une importance fondamentale pour l’équilibre social, permettant aux pauvres de subsister. Il constitue même l’une des racines historiques des Communs et en tant que tel, on le trouve consacré en Angleterre dans la Charte de la forêt de 1217, revoir le premier opus, pour plus d'infos sur cette charte. Le glanage a un lien avec les Communs, parce qu’il est aux frontières de la propriété, voire en opposition. La propriété n'est donc pas un droit absolu puisque des droits comme le glanage sont encore présents. Comme le souligne Calimaq sur son blog Scinfolex l’article R26-10 du Code pénal, prévoyant une amende pour ceux qui ne glanent pas "dans le droit", indique en creux que le droit de glanage existe toujours, y compris lorsque cette action implique de pénétrer sur une propriété privée! Bien que cet article fut abrogé par le nouveau code pénal de 1994, la Cour de Cassation, a rendu un arrêt le 17 septembre 1997 consacrant le droit de glanage. Néanmoins les propriétaires, en enclosant leur terrain (avec des murs ou des barrières) peuvent interdire valablement l’entrée aux glaneurs et les communes peuvent elles aussi interdire de manière générale la pratique du glanage sur leur territoire, en adoptant un arrêté municipal en ce sens depuis la loi du 9 juillet 1888. Ce droit est donc régulièrement rogné, attaqué, au nom du droit de propriété. Pourtant on peut se souvenir que dès le départ, les droits étaient équilibrés, si on lit l’énoncé de l'édit royal du 2 novembre 1554 d'Henri II :

…le droit de glaner est autorisé aux pauvres, aux malheureux, aux gens défavorisés, aux personnes âgées, aux estropiés, aux petits enfants…le droit de glanage sur le terrain d’autrui ne peut s’exercer qu’après enlèvement de la récolte, et avec la main, sans l’aide d’aucun outils…

On voit que le glanage ne peut pas être industrialisé ni s'apparenter à du vol... Allez lire l'article de Calimaq qui développe encore bien d'autres aspects du glanage...

Passons au droit de passage. A Theillay (41) une association d'habitants nommée « Bon pied, bon œil, les chemins pour tous » cherche à prouver que quelque 6 ha de parcelles du hameau des Brosses, situé sur la route Theillay-Méry-sur-Cher, sont la « propriété » commune de tous ses habitants et donc du « droit de passage » qui l'accompagne. Le premier rapport rendu en 2013 d'un géomètre expert mandaté par la commune tendraient à rendre propriétaires les riverains de ces parcelles. Fin 2014, l'association a donc demandé à l'historien et généalogiste Laurent Leroy. Ce dernier à conclus que les 6 ha de terrains et chemins en question seraient des biens dits « sectionaux » sur lesquels les habitants avaient des droits d'usage. Leur origine remonterait à des temps très anciens, probablement mis en place au Moyen Age. Laurent Leroy a notamment découvert qu'en 1847, les habitants se sont réunis et partagé entre eux plus de 113 ha de communs avec une liste de parcelles sur laquelle ils se sont mis d'accord. Cet épisode aurait donné lieu à un acte notarié qui précise que les habitants laissent en commun divers chemins, espaces et fosses. Laurent Leroy n'a en revanche trouvé aucune trace de ces biens communs dans les archives  et de conclure Nous sommes donc en présence de communs de hameau, des biens sectionaux dont personne n'a aujourd'hui de titre de propriété. Dans le cadastre napoléonien la plupart des communs en question ne sont pas cadastrés. Ils sont laissés parmi les espaces publics et ne donnent pas lieu à perception d'impôts. En revanche, poursuit Laurent Leroy « quelques parcelles, souvent les plus grandes pièces de champs et de bruyère, sont, elles, cadastrées comme des biens non délimités : c'est-à-dire que l'impôt qui est dû est partagé entre plusieurs propriétaires du hameau ». Rappelons que es biens de section (ou biens sectionaux) sont des biens dont la jouissance revient aux habitants d'une section de commune. Là également le droit actuel de propriété tend à grignoter ces droits de communs survivants de notre histoire.